La série des Formula 1 pour Codemasters est en train de prendre le pli des jeux qui sont annualisés et il ne faudrait pas qu'elle se contente de rester sur ses acquis. Après un Onrush qui aura été assez mal reçu et même si les équipes ne sont évidemment pas les mêmes, on pouvait être un peu inquiet. Ces inquiétudes sont balayées à la vitesse d'une F1 en pleine ligne droite.
Excusez du peu, la série des F1 nouvelle version, en est déjà à sa dixième itération... En ne faisant qu'ajouter un chiffre à chaque nouvelle année depuis 2009, les risques de sortie de route ont été nombreux. Il y a effectivement eu quelques passages dans les bacs à sable. Rassurez-vous, nous tenons ici un F1 2018 qui devrait plaire au plus grand nombre.
Rendez-vous au premier virage...
Parlons tout d'abord de l'immersion dans le monde de la Formule 1. Pour coller le plus possible aux retransmissions, c'est désormais Julien Fébreau qui apporte sa contribution aux commentaires introductifs, ainsi qu'aux conclusions des épreuves. Le commentateur de Canal + s'en sort évidemment très bien, mais on ne peut que regretter des poncifs pénibles, sans doute inhérents à ce genre de doublage. Par exemple la phrase "rendez-vous au premier virage" qui est sortie à tout bout de champ, même lorsque la course est terminée.
Ce genre de détail (beaucoup de choses vont se jouer sur des détails) a tendance à sortir un peu le joueur de l'ambiance F1 par ailleurs très réussie. De la même façon, votre ingénieur de piste a parfois des commentaires totalement à côté de la plaque. Annonçant par exemple sans ciller qu'il va pleuvoir dans 15 minutes alors que vous êtes dans votre dernier tour... Dans le même registre, il ne choisit pas toujours les meilleurs moments pour donner des informations. Il vaut mieux déranger un pilote en ligne droite qu'à l'abord d'une série de virages dangereux et en pleine bagarre.
En revanche tout le reste fait honneur au Motorhome. Le coeur solo du jeu avec le mode Carrière garde les mêmes principes qu'en 2017, mais avec une interface encore plus complète et plus claire. Les explications sur les divers élément de la voiture sont nombreuses et pertinentes (vous apprendrez comment fonctionne le DRS, l'ERS et autre joyeusetés). Il va falloir gérer à la fois la Carrière et les aspects techniques de la conduite.
En piste l'artiste !
Passons rapidement sur les modes chrono et course simple, ils font partie du cahier des charges standard. Avant de commencer une Carrière solo en bonne et due forme, vous devrez choisir votre avatar et son écurie. La hiérarchie actuelle est respectée, et les dernières subtilités de règlement sont présentes. La modification la plus évidente et qui saute aux yeux, c'est la présence du HALO, sorte de cerceau sur le cockpit, aussi indispensable à votre sécurité que moche.
Le règlement de la FIA sera d'ailleurs susceptible de changer au cours de la saison, pouvant ainsi modifier la donne au sein des équipes. A ce titre, le développement de la voiture devra être judicieux. S'il faut être plus performant en vitesse de pointe il faudra sans doute aller travailler l'aérodynamique et le moteur grâce à l'utilisation de points de performances. Les changements ne sont pas fondamentaux, mais tout a été raffiné.
L'équipe de développement sera maintenant influencée par vos propos lors des interviews qui peuvent avoir lieu après les séances d'essais, les qualifications et la course. Ainsi faudra-t-il coller au style de l'équipe et ne pas être arrogant par exemple en s'attribuant tout le mérite des performances. Vous travaillez toujours avec eux pour développer la voiture en remplissant divers objectifs pendant les séances d'essais. Évaluation de l'usure des pneus, de la consommation, reconnaissance du circuit, régularité... Ces séances sont indispensables, mais manquent de variété. On a un peu l'impression de jouer à un RPG qui demande de farmer des ressources pour avancer. Ces objectifs d'essais auraient gagné à être plus diversifiés. Peut-être en définissant des séances d'essais privés spécifiques ? Il y aurait de quoi faire.
Une conduite fine et raffinée
Ces évolutions sont ressenties dans le baquet. La voiture est sensible aux réglages, aux appuis et aux aspérités de la piste. Plus d'ailleurs que dans la version 2017. Cela ne rend pas la conduite plus difficile, mais au contraire plus intéressante. D'autant qu'il faut gérer plusieurs aspects inhérents à la conduite d'une F1 moderne. Le système de récupération d'énergie par exemple qui va alimenter le moteur électrique peut fournir plusieurs niveaux d'aide. Plus le niveau est élevé et plus la batterie de stockage sera vidée rapidement. Pour ne pas la mettre à plat, il faut adapter sa conduite et laisser la F1 en roue libre un peu plus tôt afin de recharger les accus.
Il ne s'agit donc pas simplement de rouler tout le temps à fond, il faut aussi gérer son effort et prendre des informations via la radio. Tous ces réglages à la volée s'effectuent avec une interface qu'il faudra apprendre à connaître pour ne pas finir dans le mur. La monoplace évolue au fil de la course en fonction de sa charge en carburant, des pneus, et la batterie de l'ERS diminue en performances au fil des tours. N'espérez pas terminer une course avec une voiture neuve, vous sentirez littéralement que la machine a souffert. Le challenge sera encore plus relevé avec la désactivation progressive de toutes les aides qui facilitent la prise en main dans un jeu vidéo. Le plaisir d'une victoire, ou tout simplement le fait de terminer une course bien placé n'en seront que plus gratifiants.
L'utilisation de la piste et les trajectoires seront évidemment conditionnées par le comportement de l'IA. La difficulté réglée par défaut à 20/110 sur PS4 est largement insuffisante. Un joueur habitué peut rapidement la monter à 49, puis l'augmenter graduellement pour trouver un challenge intéressant. A noter que celle-ci n'est modifiable que pendant les temps de chargement entre deux courses. Le reste du temps, ce menu reste grisé, ce qui est étonnant vu l'amélioration ergonomique du reste du jeu. Les autres pilotes sont agressifs et protègent souvent l'intérieur à l'attaque des virages. Cependant, ils lâchent assez vite prise une fois que vous êtes à leur hauteur. Ils ne sont pas infaillibles et vous aurez à gérer un certain nombre de drapeaux jaunes et même l'entrée en piste de la voiture de sécurité lorsque ce sera nécessaire.
D'ailleurs à propos d'erreurs si les dégâts sont réglés de façon réaliste, elles se paient cash avec des dommages qui bénéficient d'une localisation améliorée.
Immersif
Malgré un clipping présent, mais non gênant en course, la version PS4 s'en sort très bien. Elle conserve comme sur PC des détails qui contribuent à une excellente immersion. Traces de freinage à l'abord des courbes, nuages de poussière lorsque l'on quitte la trajectoire idéale, volutes de chaleur dégagées par les moteurs... Le tout est bien entendu modifié par les conditions météo, pluie ou brouillard et par des éclairages dynamiques pour les courses en nocturne. Les arrêts au stand ont également bénéficié de raffinements concernant l'animation des mécaniciens. Leurs mouvements sont encore un peu rigides, mais ils sont assez convaincants. Tout se joue encore sur des détails à l'image des mouvements du casque, parfaitement corrélés avec les contraintes de la piste.
L'enrobage sonore est également à l'avenant, avec une mise en avant plus marquée des sons électriques. Le léger sifflement du moteur électrique se fait sentir à l'accélération pour augmenter le couple et on sent également la transmission travailler en décélération pour recharger la batterie. Même précision pour les rugissements des voitures historiques très bien rendus. Ces dernières sont à nouveau présentes et on remonte même jusqu'aux années 70 (les années 60 pour la prochaine version ?). Ces épreuves sont proposées en mode Carrière, mais également jouables de façon séparée. Elles sont les bienvenues pour constater les grandes différences de comportement entre ces mamies et les F1 modernes.
Le HALO, potentiellement gênant selon la caméra utilisée (celle qui se trouve au niveau de la boite à air semble la plus pratique), peut être estompé pour devenir transparent. Il est aussi parfois gênant pour voir correctement les rétroviseurs. Une option d'ajout de vue arrière "permanente" aurait pu être judicieuse pour surveiller les autres pilotes et éviter de les serrer contre un mur ou dans l'herbe.
Ceux qui souhaitent un maximum de réalisme joueront bien entendu au volant. Dans ce cas, le retour de force est conséquent et demandera peut-être un semblant d'atténuation. Fanatec étant partenaire du jeu, cet aspect a sans doute été optimisé pour les volants de la marque. Tout à fait jouable au pad, F1 2018 procure d'excellentes sensations au volant. Attention, les sensations sont bonnes, mais nous ne sommes pas en face d'une simulation aussi pointue que iRacing par exemple.
L'eSport, encore en retrait
Vous aurez compris à la lecture de ces lignes que F1 2018 est un excellent cru. Dès lors, les reproches se font sur des détails et des comparaisons avec les autres jeux de sport. On pourrait par exemple apprécier qu'il y ait autant d'interactions dans F1 2018 qu'il y en a dans un NBA 2K entre réel et virtuel. Mise à jour des statistiques de façon hebdomadaire, interviews, la licence FIA pourrait être encore mieux exploitée.
Dans la même veine, les F1 eSport Series qui sont supportés officiellement par l'éditeur sont curieusement absents du jeu. Il n'existe aucun système inclus dans le jeu pour informer ou inciter les joueurs à participer aux épreuves. Pour cela, il faut aller directement sur leur site internet. En revanche, des pénalités sont bien présentes en piste, aussi bien contre des joueurs virtuels que réels que ce soit sur des dépassements cavaliers ou des virages coupés.
Les parties en ligne utilisent désormais un système de classement en fonction des performances, mais également un indice de fair-play pour ne pas croiser trop souvent de fous du volant. Autant le dire tout de suite, les premières minutes sont pénibles. Les parties se lancent rapidement et même les connexions les plus lentes semblent être gérées correctement par le netcode. Mais l'appréciation des responsabilités dans les incidents et les collisions est un peu floue. Tout cela s'améliore avec le temps et on finit par vivre des courses intéressantes. Le potentiel en ligne est grand, mais mérite encore quelques mises à jour de la part de Codemasters pour le faire vivre.
On est bien obligés d'être sévères avec les quelques points qui sont en retrait dans F1 2018. Mais l'ensemble est tellement qualitatif et équilibré que forcément les accrocs semblent plus saillants qu'ils ne devraient l'être. Un signe ne trompe pas : le temps passe très vite lorsque le jeu est lancé, que ce soit sur console ou sur PC !